INDIVIDUALISM
La jeunesse du XXIe siècle est désemparée. Elle est influencée par une masse d’informations et d’opinions plus diverses les unes que les autres. Les réseaux sociaux s’im- posent dans les moeurs et forcent inconsciemment l’individu et plus particulièrement la jeunesse vers une conformité progressive inévitable de la pensée. Avec l’arrivée des différentes technologies comme Internet, Instagram, ou même l’IA, la jeunesse ne sait plus à quel groupe elle appartient, car tous sont à portée de main. Ces technologies sont devenues des outils d’influences qui divulguent des informations totalement contradictoires. Les réseaux sociaux sont donc l’une des premières causes du déclin de l’individualisme.
L’adolescence est la période où le monde est remis en question, où l’individu se cherche et veut affirmer sa pensée sans tenir compte des contraintes culturelles, sociétales et politiques. L’âge rebel où l’individu se construit majoritairement de ce qui l’entoure. Il puise dans le contexte et l’environnement où il se développe. Un ado qui grandit dans un quartier défavorisé de New York n’aura pas la même éducation ni les mêmes goûts politiques, musicaux, vestimentaires qu’un ado qui grandit dans une fa- mille traditionnelle du XVIe arrondissement de Paris (cliché). Mais aujourd’hui tout se mélange. Certains des enfants de familles aisées s’habillent et se comportent comme les ados des quartiers défavorisés (survêtements, sacoches, baskets, cagoules, insultes, violences). Ils s’emparent d’une image rebelle, désobéissante, presque anarchique simplement parce que, par exemple, le rap est devenu à la mode, et non pas parce qu’ils en ont fait le choix individuel. L’adolescence est en effet l’âge le plus malléable. Il suffit alors d’une seule influence, d’une seule tendance (aussi stupide soit-elle), pour entraîner tout un groupe vers une pensée collective – trends TikTok, fast fashion, influenceurs/euses, tourisme, vocabulaire – tendant vers une conformité dénuée d’originalité et d’individualisme. Cette pensée collective qui devient alors la norme finit par rejeter tout principe qui pour- rait paraître non-conforme. Et si un individu ne se plie pas aux règles imposées par la norme, il est exclu, et plus particulièrement l’adolescent qui fait face à un harcèlement inouï.
Cette collection est un témoignage. Une illustration de la jeunesse actuelle pour laquelle tout se mélange, où les différentes cultures se rencontrent par le biais d’un monde ultraconnecté. Ce travail n’est pas seulement axé sur l’étude du vêtement, mais aussi sur l’étude socio- logique de l’attitude et de la pensée; sur le conflit individuel que doit traverser un adolescent lorsqu’il doit choisir quelle musique il doit écouter, quel language il doit utiliser, quelles idéologies politiques il doit adopter, à quel style vestimentaire il doit s’identifier… L’attitude nonchalante, égoïste et indifférente qui ressort de cette collection est à l’image de l’adolescent devenu détaché, étranger et insouciant du contexte actuel. Sans s’identifier au monde qui l’entoure, il finit par se renfermer sur lui-même et devient individualiste.
La création du lien entre le travail de Christian Marclay et cette collection se fait à travers plusieurs oeuvres et parallèles. [Textflussumbruch]Record Without a Cover, 1985 cherche à créer une différenciation entre la musique gravée sur le disque, et tous les défauts qui se développent par la suite (poussières, rayures…) définissants la « vraie musique » comme celle qui n’est pas controlée, celle qui est au fond naturelle. Comme un jean qui devient authentique après délavages, déchirures et tâches, ou un manteau qui prend les formes de nos épaules après un certain temps.
L’utilisation des stickers et post-its sont une référence directe au travail de C.Marclay. Il les utilise notamment sur ses disques pour marquer des endroits stratégiques lorsqu’il performe.
Sur le vêtements, ces autocollants définissent des zones de fronces, des imprimés, le milieu d’une manche, des numéros de téléphone ou encore des boutonnières. C’est le côté artisanal et DIY emprunté aux sous-cultures qui cherchent à s’exprimer avec les moyens à disposition.
Sound Holes, 2005 reprend cette idée de vide en utilisant l’image d’un objet qui semble devoir être écouté mais qui au fond ne l’est pas. C’est le même concept utilisé pour cette collection dans les hygiaphones en oeillets, et les sacs plastique vinyles. Faire ressentir quelque chose qui semble devoir être écouté mais qui au fond ne l’est pas. Laissant une place à l’écoute de soi-même – individualiste .